lundi 12 novembre 2007

Madame Necker, par la baronne d'Oberkirch

Madame Necker, par Duplessis


Madame Necker est bien pis encore. En dépit des grandes positions qu’elle a occupées, c’est une institutrice, et rien de plus. Elle est pédante et prétentieuse au-delà de tout.
Fille d’un ministre de village du nom de Churchod, elle a reçu une excellente éducation, dont elle profite par le travers.
Elle est belle, et elle n’est point agréable ; elle est bienfaisante et elle n’est point aimée ; son corps, son esprit, son cœur, manquent de grâce. Dieu, avant de la créer, la trempa en dedans et en dehors dans un baquet d’empois. Elle n’aura jamais l’art de plaire.
Pour tout dire en un mot, elle ne sait ni pleurer ni sourire.
Son père était pauvre ; elle se mit à tenir ne pension de jeunes filles à Genève ; elle fut amenée à Paris par madame de Vermenoux, dont la beauté et la galanterie sont connues.
Cette madame de Vermenoux était liée l’abbé Raynal, avec M. de Marmontel, avec d’autres philosophes, enfin avec M. Necker. Celui-ci l’ennuya bientôt, je le conçois du reste.
Il m’eût ennuyée bien autant ; pour s’en débarrasser, elle imagina de lui faire épouser mademoiselle Chruchod.
- Ils s’ennuieront tant ensemble, dit-elle, que cela leur fera une occupation.
Ils ne s’ennuyèrent point, mais ils ennuyèrent les autres et se mirent à s’adorer, à se complimenter, à s’encenser sans cesse, ils s’établirent en thuriféfaires l’un de l’autre, surtout madame Necker devant son mari.

Mémoires de la Baronne d’Oberkirch.

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